Agnès Limbos, la reine belge du théâtre d’objet, s’est vue décerner le Prix Sabam for Culture « Arts de la Scène » 2019. Le prix devait initialement être remis le mardi 10 novembre dernier dans le cadre des Rencontres du Théâtre Jeune Public à Liège. La Covid-19 a une fois de plus joué les trouble-fêtes. C’est finalement au travers d’une interview avec Eric Russon que l’auteure se dévoile et réagit à cette distinction.
Très fière de cette reconnaissance que je ne prends pas comme un hommage, mais comme un élan pour continuer à disséquer le monde sur ma table d’opération théâtrale.
Cette année, Sabam for Culture a fait le choix de récompenser une auteure/créatrice pour le moins atypique. Après avoir beaucoup voyagé, Agnès Limbos pose ses valises à Bruxelles et fonde en 1984 la Compagnie Gare Centrale. Tour à tour marionnettiste, créatrice de spectacles (pour jeune ou tout public), metteuse en scène, prêtresse du théâtre d’objet, organisatrice de master classes et de festivals, accompagnatrice de jeunes talents artistiques …, elle est une véritable touche-à-tout des planches.
Méconnue en Belgique, appréciée à l’étranger
C’est malheureusement un grand classique. Peu connue en Belgique, Agnès Limbos jouit d’une véritable notoriété à l’étranger. Que ce soit en France, où elle fut parfois qualifiée de « nouveau Raymond Devos », ou au Québec, où elle décrocha le prix du meilleur spectacle aux Masques de Montréal en 2006…
En lui décernant ce prix, Sabam for Culture espère contribuer à mieux faire connaître chez nous une grande auteure, qui fait rayonner les arts de la scène belges à l’étranger.
Découvrez-la dans cette interview :
Motivations du jury :
Patricia Ide : « Une artiste qui a fait son bonhomme de chemin, un chemin buissonnier. Agnès est une véritable artisane qui a façonné sa pratique au fil des spectacles, s’adressant indifféremment au jeune public, au public adulte ou adolescent. En ce sens elle a aboli les cloisons. Et abolir les cloisons entre les différentes formes de théâtre, c’est toujours important et opportun. Reine du théâtre d’objets, elle a non seulement fait des « bijoux » mais aussi des émules. Elle nous a ouvert les portes de son imaginaire et, simplement, avec une tempête dans un verre d’eau, ce faisant, elle à fertilisé le nôtre. Elle va où on ne l’attend pas, c’est une artiste majeure dans notre paysage, les pieds bien plantés dans le sol belge, la tête dans une bulle de BD, d’une drôlerie communicative, elle développe sans devoir rien à personne un univers fabuleux et profondément humaniste qui n’appartient qu’à elle . Sa belle humeur la fait philosopher avec détachement, sans avoir l’air d’y toucher. Ses textes, ses lumières, ses scénographies, ses musiques... nous emportent dans un ailleurs éminemment poétique. Elle est unique et singulière, et c’est pour cela, pour cette chose si difficile, l’invention d’un théâtre singulier, que je l’ai nommée en « première »».
Eric Russon : « Numéro Un pour moi : Agnès Limbos. Lors de précédentes réunions ‘Prix Sabam’, je l'ai proposée plusieurs fois. Je trouve son travail remarquable tant sur le plan « des » formes que sur le fond. Elle continue, contre vents et marées, à produire des spectacles de qualité (théâtre d'objets, théâtre musical,...) sans pour autant bénéficier d'une médiatisation outrancière (euphémisme). Ce prix ne doit pas constituer un encouragement (elle n'en a pas besoin) mais une reconnaissance d'un travail qu'elle poursuit depuis de longues années ».
Saïd Ben Ali : « Ce n'est pas seulement une comédienne que l'on récompense, c'est une auteure dramatique aussi, ainsi qu'une metteuse en scène. Mais pas seulement ... c'est également une marionnettiste et une décoratrice ! Sans compter le côté créatif de l'artiste, qui entreprend un travail sur la recherche artistique. Elle est également directrice artistique d'une compagnie, rien moins que ça. Elle est donc multiple, elle est insaisissable ! Et si vous avez la chance de la saisir, l'instant devient poétique. »
Photo : (c) Alice Piemme